Une habitude qui a gagnĂ© du terrain ces derniĂšres annĂ©es voit un grand groupe de joueurs prĂ©tendre connaĂźtre la bonne façon de jouer, dĂ©signant ceux qui ne suivent pas cette mĂ©thodologie comme occasionnels ou mĂȘme incompĂ©tents, indignes de toucher un joypad. Sur Twitch, cette tendance se dĂ©finit banquette arriĂšre, c'est-Ă -dire se sentir en droit de critiquer, mĂȘme avec des tons durs, qui est en direct, en essayant de le forcer Ă jouer d'une certaine maniĂšre, considĂ©rĂ©e comme la plus correcte.
Je ne veux pas parler de ce phĂ©nomĂšne, cependant. En fait, si sur Twitch je peux encore justifier de telles attitudes (ne vous mĂ©prenez pas, c'est trĂšs ennuyeux et vous n'ĂȘtes pas obligĂ© de le faire), parce que le spectateur contribue toujours au succĂšs du live, il a dĂ©cidĂ© de passer son temps dans la compagnie virtuelle d'un crĂ©ateur de contenu plutĂŽt qu'un autre et, dans certains cas, il fait aussi des dons, donc il peut, sans exagĂ©rer, sans ĂȘtre agaçant, avoir son mot Ă dire sur l'Ă©mission en cours.
Ceux contre qui je veux "fustiger" sont les joueurs qui agacent les autres joueurs, coupables uniquement d'avoir joué un titre comme ils l'ont jugé le meilleur, avec leurs temps, leurs compétences, leur approche. Si dans le mode multijoueur il est sacro-saint que chacun s'engage à suivre les rÚgles établies, car en ligne est une expérience partagée avec d'autres simultanément, dans le seul joueur il est inadmissible que quelqu'un d'autre vienne vous dire quoi faire et comment.
Souvent et volontiers, les joueurs toxiques dérangent ceux qui voudraient s'amuser en toute tranquillité sur trois points : jeux platine / moulin, la difficulté sélectionnée et l 'approche du gameplay.
Dans le premier cas, on a tendance Ă pointer du doigt ceux qui ne platinent pas les jeux comme indiffĂ©rents, comme un joueur du dimanche qui passe d'un match Ă l'autre sans en profiter parce que « si tu ne platines pas le jeu, tu n'as pas vraiment tout vu". Ces personnes oublient cependant que tout le monde n'a ni le temps ni simplement l'envie de aller Ă la chasse au trophĂ©e qui demandent au joueur de terminer le titre en un certain nombre d'heures, de le terminer en difficultĂ© Cauchemar ou de trouver des objets de collection qui ne servent Ă rien. Mais mĂȘme s'il s'agissait de trophĂ©es/objectifs avec une logique, est-ce vraiment si indispensable de tous les rĂ©unir pour se dĂ©finir comme un serious gamer ?
L'expĂ©rience d'un jeu vidĂ©o solo est personnelle, presque intime, car chacun entreprend une voyage diffĂ©rent. Si un titre donne des sensations particuliĂšres Ă un utilisateur pendant 40 heures d'affilĂ©e, cela ne doit pas forcĂ©ment se produire avec les autres. Ce genre d'expĂ©rience pourrait offrir les mĂȘmes sensations Ă un joueur qui a pourtant dĂ©cidĂ© de la vivre "seulement" 20 heures. Est-ce qu'aller directement au gĂ©nĂ©rique en accomplissant quelques tĂąches secondaires n'est pas la bonne façon de profiter d'un jeu vidĂ©o ? Qui a dit ça? Si l'histoire est capable de libĂ©rer le meilleur en une seule manche tout en permettant peu de distractions de la rue principale, c'est le joueur individuel qui en dĂ©cide, car chacun joue pour soi.
Soyons clairs, j'ai personnellement une haute estime pour ceux qui ont 100 platines car cela signifie avoir un grand dĂ©vouement, mais il est ridicule que ceux qui n'ont pas l'habitude de platiner, en raison d'un complexe d'infĂ©rioritĂ© induit, se sentent fautifs. ArrĂȘtons de juger les joueurs sur le nombre de trophĂ©es qu'ils ont, celui-ci systĂšme de notation des personnes, qui a connu son boom avec les rĂ©seaux sociaux comme Instagram, est abominable.
En ce qui concerne la problĂšmes avec lequel un joueur dĂ©cide de complĂ©ter un jeu vidĂ©o, dĂšs le dĂ©part ou en le modifiant en cours de travail, le discours a commencĂ© Ă s'imposer avec l'avĂšnement des titres du genre "souls" dans lesquels la difficultĂ© ne se choisit pas . Grande lutte interne entre ceux qui disent qu'il n'est pas dĂ©mocratique et "inclusif" d'empĂȘcher une frange de joueurs d'utiliser un produit en raison de sa difficultĂ© excessive et ceux, dĂ©finis comme Ă©litistes, qui prĂ©tendent au contraire que certains jeux devraient ĂȘtre pour peu. Les points de vue dans les deux cas peuvent ĂȘtre partagĂ©s, malheureusement la question s'est aussi Ă©largie sur les jeux qui permettent un large choix de modes, de trĂšs facile Ă cela pour masochistes.
Une habitude vraiment dĂ©sagrĂ©able et inappropriĂ©e consiste Ă dĂ©signer comme incapables ceux qui dĂ©cident de ne pas sĂ©lectionner immĂ©diatement la difficultĂ© la plus Ă©levĂ©e. La phrase la plus couramment entendue est : "Si vous ne jouez pas fort, vous ne l'apprĂ©ciez pas." Cela peut Ă©galement ĂȘtre vrai si cette opinion Ă©tait exprimĂ©e sous la forme de conseil amical, cela pourrait aussi ĂȘtre un bon point de dĂ©part pour une discussion. Malheureusement, la plupart du temps ce n'est pas un conseil, mais c'est une imposition : "Si j'ai jouĂ© fort, tu dois le faire aussi".
Il semble à beaucoup que quelque chose de trÚs simple, presque évident, ne leur soit pas venu à l'esprit : ce n'est PAS une course ! Nous ne sommes plus au temps des arcades, des cabinets, des dieux marquer des jeux vidéo, des classements à gravir pour devenir le roi du quartier, les expériences vidéoludiques d'aujourd'hui sont, comme je l'ai déjà exprimé précédemment, personnelles, subjectives. La façon dont un acteur est abordé ne change pas sa qualité aux yeux de ceux qui l'ont abordé d'une maniÚre différente. Si un Bologne un mec termine un jeu vidéo en mode facile, au deuxiÚme mec, qui joue à la place Syracuse, absolument rien ne change.
Il faut apporter une précision, la question est différente pour un critique. L'examinateur doit analyser la composante ludique également du point de vue de l'accessibilité, il doit donc jouer au moins à un niveau normal, puis passer aux niveaux supérieurs pour signaler tout changement dans le gameplay que lerelever le défi a fait. Un joueur qui n'a pas de devoir éditorial ou critique n'est pas obligé de le faire, il peut se lancer dans le voyage pour regarder les paysages, suivre l'histoire, devenir un maßtre, trouver chaque petit secret, l'important est qu'il se sente satisfait de la fin.
Le dernier point, c'est-à -dire l'approche du gameplay, est un peu la somme des choses dites jusqu'ici. En effet, selon la difficulté choisie, le but qui pousse un joueur à démarrer un titre, sa volonté ou non de faire un run completiste, la maniÚre dont il s'interface avec l'univers du jeu change radicalement. Y a-t-il le bon? Absolument pas.
Prenons un exemple : Hitman doit se jouer en empruntant un chemin bien prĂ©cis, cela ne fait aucun doute. C'est furtif au niĂšme degrĂ©, c'est l'apothĂ©ose de se cacher, tuer et courir sans ĂȘtre vu, terminer une mission sans alerter aucun ennemi ça donne une satisfaction difficile Ă dĂ©crire, mais s'il arrive qu'il Ă©choue, s'il arrive qu'il finisse une mission avec des dizaines de morts sur la conscience et au bilan final, dois-je me sentir comme de la merde ? DĂ©solĂ© pour le francisme, mais quand ça prend ça prend. L'avantage des titres de ce type est la possibilitĂ© donnĂ©e au joueur de amĂ©liorer, vous pouvez donc recommencer une mission et faire mieux que la fois prĂ©cĂ©dente, sinon ce n'est pas une honte indĂ©lĂ©bile de se moquer de votre propre crĂ©dulitĂ© et de passer Ă autre chose. C'est Ă chacun de nous d'en dĂ©cider.
Pourquoi dire Ă une personne qu'elle est geek si elle va au cinĂ©ma seule ? De quel droit de dire que celui qui lit un pdf ne peut pas comprendre les joies de la vraie lecture, celle des librairies, du papier ? SĂ©rieusement, voulons-nous arrĂȘter de dire aux autres comment jouer ? Cela ne nous rend pas plus intelligents, juste plus rompipalle. Excusez encore le francisme.